Je t'aime, tu m'as fais vivre de belles choses, on est parti en vacances ensemble, tu as fait de moi l'homme que je suis devenu aujourd'hui. Tu m'as offert la stabilité, la culture, un cadre de vie propice à un épanouissement certain. Tout cela, je ne pourrais jamais le nier. Grâce à toi, je m'enrichis par l'art, par ce qu'il se passe dans le monde. Mon individualité s'est construite selon un prisme libéral, j'ai découvert la richesse des individualités, tu as posé les bases m'ayant permis de me développer. Et, sans doute le plus essentiel, tu m'as offert de l'amour, tu m'as protégé lorsque la tristesse et l'imprévisibilité me frappaient. Je crois que pour ces seules raisons, mon amour pour toi existe
Cependant, il existe une autre facette de toi, d'autres facettes qui m'ont ébranlé, et aujourd'hui peut-être plus profondément que ce que je croyais avant la séance...par exemple, lorsque tu me hurlais dessus pendant les devoirs, que tu l'insultais, que tu me disais "sa gueule et son ordinateur", peut-être même "bolosse", je ne sais plus trop. Mais pourquoi? Pourquoi tu as fait ça? Je sais que tu avais tes propres problèmes, que tu as souffert dans la vie. La vie est la meilleure des amies mais aussi une connasse, je le sais que trop bien. Mais penses-tu que c'était raisonnable de hurler sur un gosse qui n'arrivait pas à faire ses devoirs? Qui était fragile émotionnellement? Je ne m'apitoie pas sur moi-même, tu ne m'as jamais battu, tu n'as jamais été violent physiquement, mais, sans t'en rendre compte, j'ai bien subi une violence psychologique, et cette séance m'a fait comprendre qui tu es vraiment
Tu es un homme bon, profondément généreux, voire sincère, et assurément aimant, mais pourquoi as-tu été violent psychologiquement? Hein? Pourquoi, selon toi, c'était le seul moyen de faire un homme selon les critères de merde hétérocentré et pseudo-virilistes que lui-même t'a implanté? Pourquoi tu hausses sans arrêt le ton lorsque tu es irrité? Pourquoi tu ne supportes pas la moindre petite critique, contradiction? En parlant de contradiction, tu me dis que je ne dois pas me mettre la pression, et ne serait-ce pas ce que tu fais lorsque tu me dis que mon contrat de travail ne va pas me faire couler dans un flot de thunes?
Bref, il doit exister en moi un amour pour toi, mais parfois, et je pèse sincèrement mes mots, je suis réellement navré, mais parfois, tu es réellement un con. Ce qui est incompréhensible chez toi, c'est que tu es fascinant, tu es une individualité riche, vulnérable, fragile, et dans le même temps, tu peux être vraiment méchant, tu peux ne pas te rendre compte de la portée de tes propos, de ton incorrigible et merdique besoin d'avoir sans cesse raison. Ainsi, cet amour que j'ai pour toi, il est ambigu, il peut être juteux, et juste après il peut se transformer en mépris, ou en tout cas en distanciation, distanciation de cette tempête que tu incarnes lorsque ça ne va pas
Alors m'éloigner de toi me fait du bien, et ça me déchire doucement le cœur de l'avouer, d'autant plus que je t'aime, mais cet amour, c'est une éclipse qui disparait sur elle-même, elle oscille en fait. Ca me fait du bien de m'éloigner de toi, je me sens faussement indépendant, certes, mais je me sens en sécurité, je sens que je peux me regénérer pour mieux résister à tes écarts émotionnels extrêmes
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J'ai toujours été là, j'ai toujours été là pour toi, on s'est pris les meilleures cuites, comme deux frères. On s'est réfugiés dans la beauté de l'ivresse pure, rassasiante. C'était magnifique, c'était une danse. On ne se prenait pas par la main, certes, mais tu étais le meilleur, j'en été persuadé. Et au final, c'est tout ce que je récolte? Je veux dire, c'est ça ta définition de la chose? Tu ne m'écris jamais, je viens tout le temps en premier, elle a l'air d'être plus importante que moi et ça me tue. Lui au moins il est là, il rigole avec moi, on parle tout le temps de choses intéressantes, il fait des efforts, et toi j'ai l'impression, j'ai plus l'impression, que je te fais chier, sincèrement...et ça me fait mal parce qu'on a tellement vécu ensemble, on a vécu des choses extraordinaires, tu m'as fait découvrir des choses insoupçonnées, et tout ça, c'est clairement merveilleux pour moi. Mais aujourd'hui, tu me forces à remettre en question le statut que je t'octroyais jadis. Cette distance entre nous, on dirait que tu ne veux rien faire pour l'amoindrir. Je t'adore, je t'adorais, et voilà comment tu me remercies, en t'éclatant avec elle et en te foutant littéralement de moi...plus le temps passe et plus mon relationnel avec toi devient clairement bipolaire, et le terme n'est pas sarcastique, c'est bien la vérité
Qui suis-je pour toi, putain? Je la comprends, elle, quand elle t'a donné rendez-vous dans ce resto' ou je sais plus où, mais en tout cas, si mes souvenirs sont bons, je la comprends de plus en plus...
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Je ne vous déteste pas, la détestation n'est pas dans mon vocabulaire courant, mais j'ai l'impression que vous vous en foutez de ma gueule en fait...alors, je vous le dis sincèrement, jeter de l'huile sur le feu ne me réjouis pas, mais faire un tri a été plus que salvateur. Je le vis comme une élévation. Maintenant je vais arrêter de passer pour le petit mec gentil et attentionné, du moins avec tout le monde. Seuls les plus méritants y auront droit, j'en ai marre de me montrer vulnérable, de me sentir vulnérable