Papa,
Je retiens de toi le courage contre la maladie
Je retiens de toi ta combativité
Je retiens de toi l'amour de la musique que tu m'as transmis
Je retiens de toi le plaisir de faire rire les autres que je continuerais de perpétuer en ta mémoire
Je retiens de toi ton sourire, le son de ton rire, tes je t'aime ma fille
Je retiens de toi ton énergie face aux événements de ta vie
Je retiens de toi ton insistance à avoir confiance en moi-même
Je retiens de toi le plaisir que tu avais à sillonner les routes même lorsque tu étais déjà malade
Je resterais toujours fière du courage que tu as eu pendant ces 2 ans
Je garderai toujours le sourire en pensant aux fous rires que l'on a eu, à ces moments de complicité
Je garderais en mémoire ce moment à chanter ensemble avec tes mots en anglais que tu savais si bien inventer
Je retiens de toi tes blagues, les nombreux séjours passés chez toi
Je retiens de toi ta fierté de mon métier
Je retiens de toi lorsque que tu me disais que tu irais jusqu'au bout du monde pour moi si j'avais besoin de toi
Il me restera de toi un héritage de valeurs, de philosophie sur la vie, des souvenirs
Il me restera de toi des paroles quand tu me disais que je vis pour moi et non pour les autres
Il te restera là-haut l'amour d'une fille pour son père
J'espère que là où tu es tu as retrouvé le père que tu as recherché toute ta vie
J'espère que là où tu es David Bowie t'apprend enfin à chanter ses chansons correctement
Il disait que l'on peut être des héros juste pour un jour
Tu resteras le mien tous les jours
Je t'aime Papa
C’était mon discours en avril après t’avoir perdu Papa. 10 jours avant mon anniversaire. Je n’ai pas pu écrire un seul mot depuis. J’ai perdu le goût des mots. Parce que j’ai peur d’écrire maintenant. Mon défouloir et autres rêveries n’existe pas, depuis ton départ. Les jours sont des faux jours, où je souris, je ris, parce que je suis comme ça. Mais dans ma tête tu as ta place. Je me retiens de pleurer et je pleure quand je suis seule, même quand je n’ai pas envie, parce que les larmes coulent sans pouvoir les retenir. J’ai tellement mal, j’ai tellement de colère. Tellement de colère…
Je me raccroche à ces 3 années de complicité et d’amour avec toi parce que la maladie nous a rapprochés. Mieux vaut tard que jamais Papa. J’ai pu trouvé en toi le Père que j’ai toujours recherché. Un peu comme toi avec celui que tu n’as jamais pu connaître. J’ai la rage Papa. Et tellement de rage quand je vois que personne n’a été là pour moi. J’ai rayé de ma vie tous ces faux amis qui ont été dans le silence radio des mois, pas un coup de fil, pas un SMS, pas une proposition de me voir. Pour ensuite quand je le fais remarquer, à ces gens à qui j’ai tout donner, je reçoive « j’ai pas le temps de penser à toi qui pleure ton père ». Ces gens à qui j’ai tout donner, je leur ai dit au revoir il y a plusieurs mois. Non je n’ai aucun regret. Des gens qui pensaient que je ne fermerai jamais ma porte. Je l’ai fermé parce que je ne peux pas accepter l’inacceptable. Je suis presque seule mais entourée de ce qui en vaut la peine. Oui tu avais raison.
Personne ne peut imaginer ce que j’ai vécu, ce que tu as vécu pendant plus de 2 ans. T’entendre hurler de douleurs tous les jours, tenir à peine debout avec tous tes traitements, les problèmes administratifs, te voir dans un état inimaginable physiquement. Personne ne voyait mes journées, m’inquiéter sans cesse, pleurer, te faire à manger, t’aider à te coucher, surveiller quand je t’entendais te réveiller. Te dire je t’aime et des câlins à chaque au revoir. Que tu faisais de même. Parce qu’on savait. Qui aurait pu supporter qu’on lui dise, il reste quelques mois à votre père. Qui pourrait supporter qu’on lui dise il vous reste peu de temps. Personne ne peut savoir que tu es allé choisir ton cercueil quand tu as su qu’il te restait seulement quelques mois pour nous éviter ça. Comment quelqu’un pourrait supporter ça.
Je n’arrive plus à supporter la malveillance des autres, les actes et les paroles degueulasses. Je ne supporte pas de savoir que nous n’avons eu que des silences du côté de la famille de ma mère, qui t’ont connu, que ma grand-mère te manque de respect en les soutenants dans leur irrespect, toi qui pourtant l’a appelé jusqu’à la fin de tes jours. Je ne supporte pas d’entendre les horreurs que l’ont dit sur toi dans notre dos. Je ne supporte pas de savoir que ta propre famille n’est pas venue a tes funérailles. Ni celle de Maman. Ah oui, à part une de tes demi sœur. Et un cousin que je n’ai pas vu depuis mes 14 ans. Mais qui a eu plus de respect que tes autres demi frères et sœurs. Et que ces gens continuent de se trouver des excuses en ne nous contactons pas. Mais nous « devons passer au dessus » comme dit Mamie. Mamie à qui je vais dire deux trois mots parce que te manquer à ce point de respect, à nous, non. Non.
J’ai retrouvé ton père biologique. Décédé depuis longtemps avant même que tu ne commence tes recherches. J’ai pu te dire beaucoup de choses. La vérité. Que tu savais déjà. J’ai passé des nuits et des nuits sur les sites militaires américains. Des test ADN, frauder la douane, des milliers de recherches. C’était comme une course contre la montre. Pour te donner le plus de vérité possible et que tu puisse partir le plus en paix possible si c’était possible … tu as su que tu avais eu un demi frère , décédé, que tu n’as jamais pu connaître. J’ai un peu de contact avec ta famille là-bas aux Etats-Unis mais peu de gens. Je t’ai promis de dire à ta famille que j’ai découvert toute la vérité et que tu l’as su avant de partir. Mais je ne peux pas pour le moment. Je veux aller le plus loin possible dans mes recherches même si je sais déjà tout. En arriver là après plus de 27 ans de recherches que tu avais laisser tomber…Et parce que je n’ai pas la force d’essayer de contrôler ma colère en les appelant un par un.
Parfois je ne réalise pas. Ça paraît irréel. C’était le plus beau cadeau que je pouvais t’offrir. Je t’ai dis qu’un jour j’irais sur la tombe de ton père pour toi. Et je leur dirais à ta famille. Qui ont tout fait pour t’empêcher de retrouvé ton père. Ils l’ont empêcher de te connaître. Pour une question d’argent. Oui tu étais la poule aux œufs d’or pour eux , comme tu le disais. Oui tu avais raison. Et je leur dirais à tous. Je te l’ai promis. Et ce jour, quand il arrivera, je sais que ça en bouchera un coin très grand à tout le monde. Parce que je suis en colère moi aussi.
Je suis allée au Stade de France seule, te rendre hommage en allant voir Depeche Mode. Tu m’as transmis l’amour de la musique, du rire, de la force.
Tu sais ton départ a créer chez moi tellement de souffrances mais à côté j’ai pu me découvrir plus sûre de moi, à ne plus accorder d’importance à des choses inutiles. Au moins, tu m’as vu devenir assistante sociale. Enfin. Je sais que c’était une fierté pour toi après en avoir tellement baver. Parfois je ne réalise pas. Ce projet depuis mes 17 ans. J’aime prendre soin des gens. J’ai accompagné plus de 50 personnes par mois depuis un 1 an. Ça fait beaucoup. Beaucoup de monde qui m’ont remercier chaleureusement. Des gens bousillés par la vie, mais merveilleux. Avec un peu d’espoir quand je les accueille. Et un grand sourire en partant. C’est toi qui m’a poussé à croire en mon projet.
Je ne retiens que les bons moments passés avec toi jusqu’au bout. C’est le plus important. Et le reste n’a aucune importance. Comme je te l’ai dit. Je t’aime Papa. Jusqu’au bout de ma vie. Ton absence est un vide, un creux dans le cœur. Qui ne partira jamais.
On croit qu’on arrive avec des faux-semblants mais en fait c’est faux. Je survis. C’est comme ça. Mais oui il y a des jours où je veux rester à pleurer chez moi. Dans mon appartement. Parce qu’au moins dans mon chez moi, personne ne me voit pleurer le soir.
Je suis persuadée que quelque part, avoir rencontré quelqu’un quelques mois après, c’est toi. Parce que tu n’aimais pas savoir que je pleurais autant quand tu étais malade. L’amour arrive comme ça. Et parfois du bout du monde. Et quand il arrive, on ne sait plus où on habite. Quand je lui raconte tes blagues, ça le fait beaucoup rire. Je pense que tu l’aurais bien aimé.
Je t’ai rendu visite tous les jours après le travail aux soins palliatifs à partir du moment où tu as perdu toute ton autonomie et que je devais te pousser dans un fauteuil. Les derniers jours tu ne pouvais plus parler, il t’était impossible de t’exprimer. Mais tu nous avait fait comprendre deux jours avant de partir que tu voulais que l’on reste de nuit avec toi. Je pense que c’est parce que tu savais. Et que tu avais peur. J’ai pu te dire des derniers mots d’amour. Que tu puisse lâcher prise.
Tu as tellement souffert Papa et c’était insupportable. C’est insupportable. J’ai de la haine. Mais ça ne se voit pas. Je la cache. Mais j’ai envie de tout casser. D’hurler. De hurler de douleur…. Même quand je pleure c’est une souffrance inimaginable alors je ne veux pas pleurer. Mais je pleure. Même là.
Mais je vais bien Papa. Je vais bien dans ma tête, dans mes baskets, dans ma vie. Je suis heureuse malgré tout. Comme tu l’as toujours souhaité. Tu m’as offert une belle-mère extraordinaire, avec qui je passe beaucoup de temps, a rire, à qui j’ai présenté cette personne avant même Maman et mon frère. Ton fils qui a été très courageux pour son âge et qui t’aime sois-en sûr.
Parfois il se passe des choses inexplicables et je me dis, oui il est possible qu’il y ai un peu de toi pas loin, tout près. J’espère juste simplement que tu ai pu voir ton père là où tu es avec qui tu apprends à parler anglais. Enfin !
Parfois j’ai l’impression que je vais me réveiller. Et que je vais te voir. Tu me manques tellement Papa. Je n’ai pas pu m’empêcher de pleurer devant lui. Tu sais sa réaction ça a été de me dire que c’était ok et de me serrer fort. Pendant de très longues minutes. Qui me dit que j’ai le droit de parler de toi autant de fois que je le souhaite. Parce qu’il sait ce que c’est. Si c’est toi, oui tu as choisis quelqu’un de bien. Tu as du goût.
Je pense qu’on vit avec la perte toute sa vie. C’est tellement injuste tout ça. Tu m’as impressionné par ta force. J’ai découvert la pureté de ton cœur, ton amour et tu as vu le mien envers toi. C’est ce que je garde en tête chaque jour.
Je t’aime Papa.