TW Insensibilité au s**cide

⚠️ Trigger Warning - Ce topic contient des contenus pouvant heurter la sensibilité de certaines personnes.

Moon

Membre supprimé
26 Jan 2022
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Comme l’a souligné Albane, le suicide (et la tentative de suicide) ne sont en général pas des choix cartésiens.
Sauf cas de maladie grave, une personne dans son état normal ne va pas mettre sur la balance le fait de vivre et le fait d’arrêter sa vie et faire son choix. C’est avant tout une décision affective, à laquelle une souffrance insupportable peut mener.
On retrouve généralement lors d’une crise suicidaire de l’agressivité et de l’impulsivité. C’est pourquoi certain.e.s peuvent franchir le pas dans un moment de détresse, car leur perception est altérée et le danger leur paraît moindre. En effet, le choix de se suicider ne s’arrête pas à « c’est la mort et ensuite il n’y a rien ». Les suicidé.e.s ne trouvent pas la mort dans leur sommeil, iels endurent des souffrances auparavant en s’ôtant la vie, et mentalement nous sommes conditionné.e.s en tant qu’humains à avoir peur de mourir.
D’un point de vue neurologique, on peut observer que ces symptômes de crise correspondent à une altération de certains neurotransmetteurs. Il est donc faux de dire que quelqu’un de dépressif qui se suicide sous le coup d’une impulsion le fait totalement délibérément.

Par ailleurs, une autre chose sur laquelle je souhaiterais rebondir, c’est ce « Je me rends compte que je suis assez insensible aux envies/menaces de suicide ». Diverses études ont pu montrer que dans 75% des cas, la personne qui se suicide fait part préalablement de ses idées suicidaires à ses proches.
Une menace de suicide n’est jamais à prendre à la légère. Par exemple, je doute sincèrement du fait qu’il puisse exister du « chantage au suicide ». Une personne extérieure au ressenti de la personne concernée pourra le ressentir et le nommer comme tel, mais une personne qui en vient à formuler une envie de mourir est dans un état de détresse extrême, qui ne peut être résolue ni par la « volonté » ni par le « courage ». Des menaces de suicide répétées n’amoindrissent pas le risque chez le suicidaire de passer à l’acte.
De même, une tentative de suicide, même en ayant ingéré une dose insuffisante de médicaments, n’est jamais anodine dans ce qu’elle représente.
Je pense qu’il faut voir les menaces de suicide comme une tentative chez quelqu’un qui tient à la vie d’échapper au pire en alertant ses proches de son état. Comme je l’ai mentionné, la plupart des gens qui se suicident réalisent des appels à l’aide avant de ne plus pouvoir faire face à leur douleur.

Ce qui transparaît finalement dans ton message, c’est un manque de compréhension de ce que peut ressentir une personne suicidaire. En réduisant ce geste à un « choix », tu élimines par là-même la complexité et le caractère multifactoriel des sentiments et des altérations physiques et psychiques qui peuvent pousser quelqu’un en grande souffrance à mettre fin à ses jours.
Malheureusement, ce comportement est fréquent et conduit à la stigmatisation des personnes suicidaires, qui traversent un passage très compliqué de leur vie et qui peuvent être de plus culpabilisées et accusées d’être toxiques pour leur entourage alors qu’elles sont généralement les premières à s’auto-incriminer et à se rabaisser.
Dans l’idéal, il faudrait toujours se mettre à la place de l’autre et comprendre qu’on ne peut pas forcément agir rationnellement en étant dans un état de grande souffrance. Les crises suicidaires, comme la dépression, peuvent avoir une fin et être soignées, et la personne concernée peut à ce moment-là retrouver une cognition normale et être en mesure de décider de ses choix, mais pas pendant.

A ce sujet, un site qui revient sur les idées reçues concernant le suicide et le comportement à adopter face à une personne en souffrance telle qu’elle formule des idées suicidaires:
 
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Lorian

Vagabond
Membre banni
19 Juil 2022
11
6
D'accord avec la plupart des points exposés par Moon et Albane. En effet le moteur premier c'est la volonté de cesser de souffrir, souvent dans un contexte émotionnel qui altère les facultés de jugement. C'est pour cela qu'il faut aider voire protéger les gens à risque.

Une seule réserve : les chantages au suicide existent bel et bien, notamment dans le contexte des relations amoureuses. "Si tu me quittes je me suicide/flingue/..." c'est une phrase qui s'entend régulièrement et qui vise à faire culpabiliser la personne qui veut arrêter une relation. Autant il faut être attentifs aux gens à risque, autant dans ce cas il ne faut jamais céder, pour deux raisons principales :
- Une relation basée sur la peur que l'un des deux se suicide en cas de séparation est toxique et non viable.
- La personne qui en quitte une autre est le plus mauvais des soutiens puisqu'elle est la source de la souffrance. En général il faut mieux qu'elle s'éloigne.

Donc éventuellement prévenir les proches en cas de chantage au suicide, mais ne pas céder.
 
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Albane

Initié(e)
28 Juil 2022
342
179
Le pire c'est le Paradis car on s'y emmerde et on ne peut pas s'y suicider vu qu'on est déjà mort. 😁
 

Try

Initié(e)
5 Fev 2022
207
230
Ce sujet me parle un peu trop... Depuis assez jeune j'ai des phases suicidaires. J'ai eut énormément l'occasion d'y penser. Autant sur le pourquoi que sur le comment.

Je pense que le pourquoi se résume en 3 grands axes :
- appel à l'aide : on se sent en détresse, on a besoin que les gens sachent à quel point, et qu'on nous prenne au sérieux sur le fait que ce soit grave. Et basiquement, qu'on prenne soin de nous.
- échapper à la souffrance, à l'intensité de la douleur, à sa durée, à l'absence d'issue visible et d'espoir. On es incapable de gérer mentalement ce qui nous arrive. C'est juste trop. On est fatigué de supporter, on veut que ça s'arrête. On est faible d'optimisme. Faible tout court, et sur le point d'abandonner. Avec amerturme et tristesse
- nihilisme. Celui là est plus technique. Rien n'as de gout ou d'interêt. Tout est subjectif. Ca n'as pas plus de sens de survivre que de mourir. L'univers se contente d'être, et il n'y a que les humains pour arbitrairement dire que ce qui a tendance à être, est ce qui devrait être. On a tendance à chercher à survivre. C'est pas pour ça que c'est bien.

Pour répondre à l'auteur je comprends. On est chacun responsable de soit même. Et quelqu'un qui se suicide prends une décision pour lui. On peut pas faire plus pour soit meme que ça. Après, ça n'empêche pas d'avoir de la compassion. Ca me rappelle cette vidéo où une femme enceinte avec le gros ventre demande une place pour s'assoir, et l'homme lui répond avec dédains que c'est son choix d'avoir un enfant et qu'elle devrait l'assumer. Et même si c'est limite "légal" de penser ainsi, c'est tellement individualiste et dénué de bon coeur. Rien ne nous oblige à avoir du bon coeur. On peut très bien être un enfoiré dans son bon droit. Et à l'inverse, on est pas une mauvaise personne parce qu'on refuse de porter toute la misère du monde sur nos épaules. Y a un juste milieu. Faut choisir ses combats. En principe, il serait bien d'avoir du coeur pour nos proches, et de temps en temps avec des inconnus.

Au sujet du chantage au suicide, je peux malheureusement témoigner... Lors de mes deux ruptures, j'ai eut des crises qui m'ont poussés à prévenir que je comptais en finir. La dimensions chantage n'était pas aussi simple que ça en a l'air. Il y a eut des moments où c'était une forme de chantage. Je suis loin d'en être fier. Je regrette. Mais j'étais vraiment tellement démuni. Forcé dans un deuil pourlequelle je n'étais pas prêt. Pas assez mature. Avec l'illusion d'avoir un semblant de pouvoir... Et dans une telle détresse, c'est dur d'y résister. Simultanément, ça ne se résumais pas uniquement à du chantage. Parce que dans la détresse où j'étais c'était aussi sincèrement les options que je me représentait. J'étais pas prêt à gérer le cas où j'étais forcé dans le deuil. Forcé dans l'éloignement.

J'ai fais une TS où j'étais pourtant assez déterminé.. Et elle a échouée. J'ai réalisé que les infos qu'on peut trouver sur internet sur les dosages en tout genre sont complètement aléatoire, ou si dépendante de à qui à s'adresse qu'elles ne sont pas fiables, et d'autant plus dangereuses. Faire cette tentative m'as demandé beaucoup d'énergie mentale, parce que c'est tellement pas ce que je voulais au fond du fond. Et accepter la défaite de sa propre vie, c'est lourd... Au fond du fond on veut être heureux. Et avoir la sensation que ça nous est refusé, avec la force et l'intensité, on est sûr à 99% que c'est acté. Mais ce foutu dernier pourcent... Il fait hésiter.

Et je finirai sur une reflexion à propos de la notion de choix. La réalité c'est qu'on peut pas classer un choix de "rationnel" ou "émotionnel / irrationnel" de façon aussi binaire. Un choix, c'est avant tout le moment où on passe des pensées aux actes. Mais la qualité du choix dépend des cartes qu'on a en main. Et parfois on est forcé à jouer. Pressé par le temps, préssé par la douleur, préssé par tout un tas de contraintes, encadré par le fait que dans toutes situation il y a un cadre qui ferme des portes. Parfois le "bon" choix aurait été plusieurs étapes avant. Et une fois cette étape passée, il ne reste que des "mauvais" choix possibles. Et on pourrait croire que je rejoins l'auteur du sujet en validant que c'est effectivement un choix. Mais c'est là que je bifurque : le problème de dire "il l'as choisi" c'est que c'est hyper passif. Ca remet rien en question. Parce qu'il y a un vrai problème ici. Un suicide n'est pas anodin. C'est le témoin d'un échec. Un truc où ça aurait été bien qu'un peu de bonté humaine s'immisce. A l'inverse, je ne remet pas en question qu'il y a eut un choix, et de ce point de vue, je pense que ça devrait atténuer une éventuelle culpabilité de la part des proches. Mais une remise en question devrait avoir lieu. Sinon ce serait encore plus triste...
 
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Albane

Initié(e)
28 Juil 2022
342
179
Ce n'est pas si simple. Il y a des cas où un peu d'attention des proches aurait permis d'éviter le suicide, mais souvent cela n'aurait rien changé. Par exemple parmi les personnes bipolaires de type 1 diagnostiquées (donc suivies par un psychiatre), 15% meurent par suicide, parfois même en hôpital psychiatrique, malgré les professionnels. Plus de 90% des victimes de suicide ont un trouble psychiatrique. La pulsion suicidaire peut résister à tout, notamment dans ce contexte.

Pathologie sous-jacente ou pas, les signes avant-coureurs ne sont parfois évidents que rétrospectivement. Ils font terriblement culpabiliser les proches, qui vivent en effet la situation comme un échec, alors qu'ils ne sont pas devins et que, même en sentant un danger, ils n'ont pas toujours les moyens de prévenir l'acte. (même des professionnels n'y arrivent pas). Beaucoup de dépressifs profonds font TS sur TS avec des proches impuissants qu'il ne faut pas juger.

Ceci étant en effet il y a de gros progrès à faire en matière de prévention et moins les gens trouveront normal q'un jeune de 17 ans se suicide mieux ce sera. Il faut de l'écoute, des mesures de prévention (éloigner les médicaments les plus dangereux, je n'en donne pas la liste ici pour ne pas qu'elle soit mal utilisée) et pousser à consulter et à se faire aider.