Bonjour,
Il n’y a pas longtemps, j’ai entendu quelqu’un dire: « Réduite son vocabulaire c’est réduire sa pensée». Aujourd’hui, je me pose la question. Selon vous est-ce vraiment le cas ?
C'est marrant, une phrase comme ça pourrait venir de moi. Je pars du principe qu'en effet, réduire son vocabulaire, c'est en quelque sorte réduire sa pensée. En fait, pour résoudre des problèmes, il faut être apte à bien les décrire et pour bien les décrire, il faut avoir de quoi les décrire, à commencer par un vocabulaire élargi. Un vocabulaire élargi n'a pas seulement une utilité esthétique mais a aussi une utilité dans la délimitation des éléments du réel.
Si j'approche le concept d'agressivité, je peux me dire qu'agresser, c'est lorsque quelqu'un tape un autre. Pourtant, on peut aller plus loin que ça, on peut creuser et se rendre que l'agressivité n'a pas lieu que lorsque des coups sont portés. De ce fait, ça amène à redécrire et voir que l'agressivité est présente lorsqu'il y a un acte nocif. Mais on pourra voir qu'un acte nocif est relatif à l'individu qui le subit. On verra alors en creusant que l'agressivité est une déstabilisation, une désorganisation, un bousculement. Chacun de ces mots désigne quelque chose de différent, la déstabilisation indique la présence d'une stabilité et met l'accent sur la présence d'une trajectoire. La désorganisation indique la présence d'une organisation et met l'accent sur la présence d'un réseau. Un bousculement indique la présence d'une forme d'équilibre et met l'accent sur le choc.. cinétique ?
On pourrait creuser encore, bien sûr, mais un vocabulaire élargi permet une approche approfondie d'un sujet et cette approche permet donc de prendre de meilleures décisions, d'avoir un meilleur rapport à certaines choses. Savoir par exemple pourquoi nous nous sentons agressés permet de ne pas dramatiser des événements, de ne pas ajouter de la tristesse à notre tristesse, de considérer l'agression en nous et de savoir comment elle prend place et d'où elle vient, et cetera.
Et ce n'est pas tout, le vocabulaire peut aussi figurer dans ce que j'appelle notre
lexique mental. Le lexique mental, c'est les mots qui nous viennent à l'esprit lorsque nous abordons le monde. Des personnes en situation de dépression auront alors un lexique mental chargé de mots plutôt dépréciateurs ou dévaluateurs et ces mots amèneront ces personnes à filtrer ce qui est déprécié. Cela nourrira la boucle et n'augmentera pas la probabilité de venues de sentiments de joie (bien sûr, ce n'est pas de leur faute, ce n'est pas la question ici). Enrichir son vocabulaire, c'est se donner des nouveaux mots à travers lesquels percevoir le monde et influencer notre état moral.
Enfin, le vocabulaire a sûrement aussi des vertus sur la mémoire, un vocabulaire riche dans la description d'une information engendre sûrement un meilleur encodage d'une information.
Enfin voilà !